Le village de Saumane est situé dans les Monts de Vaucluse. Il était antérieurement appelé Somanna ou Saumanna et aurait pour étymologie, sommet (som) ou ânesse (sauma). Le site comprend de nombreuses grottes qui étaient habitées bien avant l'ère Chrétienne.
Pour l’histoire d’une émancipation qui lui valu mille tourments, un certain Marquis de Sade résida à Saumane dans un château appartenant à l’un de ses oncles, où, selon les ragots de l’époque, il s’y faisait quelque expérience dans le domaine du libertinage et de la débauche coquine, si vous voyez ce que je veux dire !!!
Donatien Alphonse François, marquis de Sade est né en 1740. Il est le fils d’une grande famille, dont le père Jean Baptiste, comte de Sade était : Seigneur de Saumane et de Lacoste, et coseigneur de Mazan. De nombreuses propriétés et châteaux, sis en Provence, sont accolés au nom des Sade, dont le musée Calvet en Avignon.
Sur les 74 ans que dura sa vie, celui à qui l’on attribue l’origine du mot sadisme, passa 27 ans privé de liberté, soit en prison et à la Bastille pour une part, soit à Charenton dans la célèbre maison pour fous. Il doit une partie de cette sanction à un certain Bonaparte et aux Papes avignonnais, moralistes pour raisons politiques !
Le marquis de Sade qui s’éteignit en 1814 reste, toutefois, un philosophe reconnu à la pensée sans tabou et un écrivain dont le style dérangeait l’hypocrisie d’une bourgeoisie voulant nier tout talent à un homme qui livre son intimité !
A prèsent, c'est parti, nous marchons...
Michel, le Parisien dont je parle dans mon récit ‘’D’un moulin à l’autre’’, était, pour ce 27 février 2011, le guide suprême du groupe des Galéjaîres de Barbentane. Pour la traduction, les Galéjaîres sont des conteurs, des amuseurs, des taquins également. Le choix de ce départ ne lui fut pas discuté, peut être pour les histoires croustillantes qu’il laissait augurer !
La curiosité, peu après le départ, fut de voir un oratoire planté à la croisée des chemins. Une Madone logée dans son habitacle, l’air compatissant, accueille la colonne des pèlerins qu’elle croit sans doute avoir reconnu comme étant les disciples repentis de l’ancien locataire des lieux !.
Pour la photo, par politesse, par dévotion pour certains, une halte est faite au pied du monument. Sur des plaques de marbre, en langue provençale, un discours nous est écrit sur l’origine de cette Piété. Il se veut rassurant, ce qui nous engage à partir pour notre croisade a travers les pins, les chênes verts, le thym et autres senteurs dont parle Gilbert Bécaud dans les marchés de Provence.
Habillés de tout ce qui peut tenir chaud, nous voila partis sur un chemin de pays qui conduit en direction d’un sommet pierreux. Il sera le point culminant de notre randonnée. Un vent violent et froid perturbe notre marche sur un sentier dont la pente est sévère. Il s’agit d’un phénomène climatique appelé ici, le Mistral noir. Les nuages chargés de résidus neigeux qu’il pousse en provenance des Alpes, assombrissent le ciel au point de le boucher. Sur les tronçons découverts, Eole nous bouscule. Le paroxysme est atteint à l’approche de la vigie où des bourrasques avoisinant sans doute cent à l’heure, mettent à l’épreuve un équilibre que l’on a du mal à maîtriser.
La situation m’amène à préciser que dans ces conditions, les hommes, pour leurs arrêts pipi ont intérêt à prendre en compte la direction du vent. Je conseille en effet, par expérience et pour limiter une prise de risque, un positionnement vent favorable qui de plus, donne l’impression aux septuagénaires du groupe de pouvoir encore pisser loin !!!
Sauvés, la descente sur Valescure s’opère sur un versant presque au sud. L’abri qui en découle est le bienvenu, alors que la traversée d’éboulis met Pierrette en difficulté. Elle, qui sans encombre nous arrive d’un périple aux Indes, la voilà scotcher devant un monticule de gravillons et de sable ! Et pendant ce temps, le Michel en question, chevalier servant de la Dame, il faut que vous le sachiez, caracolait en tête. Normal dirent certains, puisqu’il est le meneur, mais tout de même !! Heureusement que Daniel, pressentant le risque d'une chute possible restait dans ses pas au cas où..... Etait-ce une entente avec le Parisien ?. Mais...., cela ne nous regarde pas !
Valescure est une propriété de 240 hectares nichée dans un vallon. Elle a été rachetée par la commune de Saumane qu’elle sauve petit à petit de la friche et de la ruine pour ce qui est des bâtiments. L’endroit est superbe, un coin en dehors du couloir venteux est choisi pour le pique-nique. Je surprends notre guide qui lève le verre de la satisfaction, devant son Indienne retrouvée. Le coup de fourchette des marcheurs est vaillant. Le cœur est à la fête devant cette nature qui s’offre en spectacle. Le soleil revenu et le vin, au delà d'apaiser la soif, remettent en route le réchauffement des corps que le froid avait engourdi.
J’aime entendre le vent lorsque j'en suis à l'abri. J'aime, après un repas aussi frugal fut-il, m'allonger sur un lit de feuilles avec mon sac à dos pour têtière. J'aime, à l'écart du groupe, partir vers mes ailleurs où vivent mes souvenirs, où naissent mes projets.
Le retour se fait sur des chemins que l’homme a empierré voici des siècles. Des murets de pierres sèches en bordent la limite. La campagne, encore endormie semble vouloir profiter d’un supplément de repos avant d’être assaillie par les grosses chaleurs
de l’été et le vacarme des touristes.
Encore une journée mise à profit pour partager un plaisir qui ne coûte que l’envie de vouloir. De vouloir être heureux avec pour seule richesse une paire de chaussures, quelques vêtements chauds, un sac à dos, une petite dose de courage pour affronter la froidure. Encore une journée à saisir l’occasion d’être ensemble. Encore, encore, et surtout la chance d’une conscience convertie à la valeur des bonheurs simples.
Dans le haut du village que nous gagnons dans un dernier élan, les grilles du château du Marquis de Sade sont fermées. Quant aux murs de sa grande carcasse, ils sont restés gardiens de leurs secrets, malgré les sollicitations de ceux, qui encore aujourd’hui, cherchent à les faire parler !